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Témoignage de Gaëlle

« Grossesse difficile, perte d’autonomie, isolement rapide »

Je pense que tout a commencé pendant ma grossesse. Vers 5,5 mois, des douleurs sous le ventre et de chaque côté à l’aîne sont apparues en allant crescendo jusqu’à l’accouchement. Les deux derniers mois et demi, je ne tenais plus debout plus de 5 minutes. Je n’ai pas eu le choix de rester allongée des heures pour soulager ces douleurs que le corps médical ne reconnaissait pas. L’accentuation des douleurs au travail (la position assise m’était insupportable) mon corps criait « stop » mais malheureusement, je n’ai pas été entendue rapidement par ma gynécologue.

Mes recherches personnelles m’amènent à identifier le syndrome de Lacomme. Diagnostique validé par ma gynécologue tardivement. Cet alitement non reconnu lors des derniers mois de ma grossesse, la perte d’autonomie et un isolement rapidement -> impossible de conduire (vibrations insupportables), m’ont démoralisée. Je me suis réfugiée dans le sommeil pour que le temps passe plus vite.

« Accouchement vécu comme traumatique »

Lors de mon accouchement, dès l’arrivée de mon fils, j’ai senti que qqch n’allait pas. J’ai senti dans mon cerveau qu’un « stutz » avait pété. J’ai eu un accouchement rapide (3h entre la perte des eaux et son arrivée) qui m’a complètement traumatisée. Je suis sortie de mon corps et je voyais la scène depuis en haut, comme si je n'étais plus là. Ensuite, rétention placentaire, direction le bloc opératoire sous narcose complète pour faire sortir le placenta manuellement. Je me suis réveillée et j’ai dû réaccueillir mon fils alors que j’étais encore complètement dans les vapes.

Les nuits à l’hôpital ont été sans fin. Les insomnies, les angoisses, les douleurs post accouchement, mon utérus enflé par le retrait manuel du placenta, les douleurs de Lacomme encore présentes, ont fait qu’il m’était impossible de m’occuper de mon fils. Je n’arrivais pas à dormir, j’avais les flashbacks de mon accouchement et l’obsession d’avoir fait une erreur avec ce bébé. Je demandais à ce qu’il soit placé en pouponnière la nuit. Les angoisses ont commencé à l’hôpital.

« Retour à domicile, les nuits s’enchaînent et je dors peu et très mal »

Puis, lors du retour à domicile, les nuits s’enchaînent et je dors peu et très mal, j’angoisse énormément. Je ne comprends pas ce qui m’arrive. Je ne me reconnais pas. Je regrette ce bébé. Je regrette cette situation. J’ai peur d’avoir gâché ma vie. Je me sentais morcelée. Comme s’il manquait des bouts de moi.

Rapidement je comprends que je fais une dépression post-partum. Je suis très lucide sur ma situation ce qui d’après la pedopsy qui confirmera la dépression post-partum, est une immense souffrance, car très souvent, les mamans ne réalisent pas et sont plutôt dans le déni volontaire ou non.

« J’enchaîne les rendez-vous avec différents professionnels mais aucun suivi ne tient »

J’enchaîne les rendez-vous avec différents professionnels mais aucun suivi ne tient (coordination suivi et médication compliquée avec psychothérapeute, feeling, places rares, désaccord par rapport à la médication etc.). Le temps passe, les crises d’angoisses s’amplifient au point que je ne peux plus m’occuper de mon fils. Je ne supportais plus ses pleurs, le voir me provoque d’immenses peurs. Je suis paniquée à l’idée de cette nouvelle responsabilité.

Je me sentais de plus en plus mal, je ne mangeais plus, ne dormais plus, j’avais la diarrhée, je vomissais je me sentais si mal, complètement désécurisée. Je n’étais plus moi. Je disais à mon mari que j’avais perdu mon âme qu’elle devait errer quelque part. Prendre une douche était devenu impossible. Je pouvais rester des heures entières à rester assise sur le canapé à supporter les angoisses. J’étais un zombie. C’était terrifiant. L’impression que ma vie était fichue. Il y avait une scission dans ma vie. Comme si ma vie s’était arrêtée. Il y avait ma vie avant mon fils et ma vie après lui.

« L’envie de fuir »

L’envie de fuir était omniprésente. Je m’imaginais partir en douce, abandonnant mon mari et mon fils. Puis cette idée me transperçait le cœur car c’était impossible pour moi de faire une chose pareille. Alors j’ai commencé à en vouloir à mon fils, je voulais qu’il disparaisse. Mais aussitôt je chassais cette pensée affreuse en pensant à ce petit être si fragile qui n’avait rien demandé. Je me sentais comme prise au piège. Aucune solution m’apparaissait comme viable. J’avais l’impression d’être folle.

« Je veux mourir, disparaître pour que cette situation s’arrête »

C’est là que j’ai commencé à me dire que je voulais mourir, disparaître pour que cette situation s’arrête. A ce stade, j’ai dit stop. Je me suis protégée et j’ai protégé ma famille en demandant une hospitalisation.

Pendant un mois, j’ai été hospitalisée en hôpital psychiatrique. Quelle douloureuse expérience. Heureusement mon mari est venu avec mon fils régulièrement pour maintenir le lien. Ça m’a sauvée.

Un traitement médical a été mis en place. Une hospitalisation chaotique car beaucoup d’incompréhensions avec le corps médical. Livrée à moi-même, vivant des nuits atroces où se mélangeaient la peur, la culpabilité, la honte, le rejet, les cauchemars, l’accouchement, transpirant des litres et incapable de me lever pendant plusieurs heures. Seule face à tout cela. La solitude m’a tellement pesée. Je réalise quelle force j’ai dû mobiliser. Chaque matin était un combat pour vivre. Chaque matin la même difficulté à me lever, à commencer ma journée. Chaque matin était un enfer.

« J’ai tenu ces quatre semaines à l’hôpital psychiatrique pour mon mari et mon fils avec une volonté féroce de m’en sortir. »

Les journées n’en finissaient pas, assise, j’étais paralysée par les angoisses des heures dans mon lit, à trouver quoi faire pour m’en sortir. J’ai tenu ces quatre semaines pour mon mari et mon fils avec une volonté féroce de m’en sortir. Chaque matin, un nouveau combat pour maintenir la vie. Après quelques tests de retour à la maison lors de permission de sortie les week-ends, il était évident que je n’arriverais pas à rester chez moi. Pourtant, après un mois, j'ai demandé à sortir de cet endroit même si j’avais toujours de fortes angoisses. Il fallait que je sorte de cet hôpital, de ce lieu qui devenait de plus en plus anxiogène.

« Après l’hospitalisation, encore un mois chez ma maman, début d’une thérapie, retrouver un peu d’autonomie, enfin voir les sourires de mon fils ».

Je suis allée vivre encore un mois chez ma maman avec des visites chez moi pour voir mon mari et maintenir le lien avec mon fils. Démarrage d’une thérapie avec un psychiatre bienveillant qui écoute et valide mes ressentis et cela me fait du bien.

Un samedi, j’ai senti que je devais retourner chez moi. Un peu du jour au lendemain, les angoisses ont disparu et petit à petit, j’ai retrouvé mon âme. Je me suis retrouvée et j’ai pu m’acclimater à cette nouvelle vie en tant que maman. J’ai recommencé à m’occuper de mon fils et les petits bonheurs sont enfin apparu.  

« Cette expérience m'a traumatisée. Elle m’a complètement chamboulée, un véritable tsunami intérieur. »

Cette expérience m'a traumatisée. Elle m’a complètement chamboulée, un véritable tsunami intérieur. Tout mon corps était dans un état d’alerte permanent, où tout était effrayant. Comme si j’étais une proie livrée à ses prédateurs. Je pensais ne jamais m’en sortir. Condamnée à vie à vivre ainsi.

Avec du recul, je pense que j'ai eu beaucoup de mal avec mon nouveau rôle de maman. Un décalage entre ce que l’on m’a dit de ce qu’allait être maman et ce que ça a été vraiment. Une crise identitaire où tous mes repères ont été balayés du jour au lendemain. Je ne me reconnaissais pas. Je ne me sentais chez moi nul part. Je ne savais pas où aller, où était ma place, j'étais terrifiée, je me sentais en permanence en danger.

« Aujourd’hui je vais bien ».

Aujourd’hui je vais bien. Je suis heureuse avec mon mari et mon fils. Je ne regrette plus mon choix d’être maman. J’ai du plaisir avec mon fils et nous avons une bonne relation. Je l’aime plus que tout au monde. Je réalise la force de notre lien. Indestructible.

Je me dis que j’ai beaucoup de chance d’avoir un mari qui a compris ce qui se passait pour moi. Qui m’a soutenue comme il a pu, sans jamais me juger. Il me rappelait que ce que je ressentais était de l’ordre de la maladie, que ce n’était pas mon état normal et que ça allait passer. Il y croyait pour moi alors que moi je n’y croyais plus.

Ce passage de vie terrifiant m’a appris à croire en moi malgré tous les obstacles auxquels j’ai dû faire face. Je sais maintenant que je peux croire en moi. Je me sens plus forte et plus sûre de moi. Je sais aussi que malgré la maladie, aussi forte soit-elle, le lien avec mon fils est indestructible.